Leur mythe fascine, leur histoire, leur statue difficile à comprendre, leur place dans la société traditionnelle nippone. De ce fait elles ont souvent été la « proie » de journalistes indiscrets les suivant de près et les photographiant de façon frénétique. En se rendant rares, elles se protègent et cultivent à la fois le mystère qui les entoure. Je revois encore leurs pas feutrés s’éloigner vivement. Mais alors… comment fait-on pour voir une geisha ?
Une geisha c’est quoi ?
Détrompe-toi. Une geisha n’est plus ce qu’elle fût un temps : une femme de culture offrant parfois des faveurs sexuelles. Aujourd’hui, une geisha est une femme éduquée à l’art : à la musique, à la danse, au chant etc ; qu’on invite lors de soirées pour faire l’animation ou la conversation et qui divertit les convives aisés. Les jeunes filles reçoivent une formation stricte dans les règles de l’art. Elles sont maiko lorsqu’elles sont élèves et deviennent geiko avec l’expérience. Leur différence est à peine perceptible mais avec un peu d’observation et de connaissances quelques détails peuvent en effet révéler leur statut : leur maquillage, leur coiffure, leurs vêtements, les couleurs qu’elles portent ont leur signification. Elle représentent la beauté, la féminité, l’élégance et l’excellence.
Comment apercevoir une geisha ?
La solution facile pour apercevoir une geisha serait simplement de se payer la compagnie de l’une d’entre elle le temps d’une soirée et pourtant, n’imagine pas que cela soit facile. J’eus entendu dire qu’on entre pas comme cela dans un établissement où les geisha se produisent. En effet il faut y être recommandé et invité par un habitué. Pas évident donc.
“Je rêve de voir des geishas
mais cela n’est pas aisé paraît-il.”
Bien sûr il doit bien exister des spectacles et je crois avoir lu qu’une agence propose même des rencontres assez inédites mais pour les voir en vrai, sans les interrompre dans leur quotidien, il suffit d’être au bon endroit au bon moment…
Pour avoir la chance de croiser l’une d’entre elles, le quartier de Gion à Kyoto est certainement le meilleur endroit. Tôt le matin elles sortent se promener et vaquer à leurs occupations en dehors des okiya, maisons de geisha. Tout au long de la journée, n’imagine pas les rencontrer : elles travaillent dur à leur éducation, puis se préparent de longues heures durant. Le soir venu, une nouvelle chance de les apercevoir se présente au moment où elles filent à travers les rues, à leur rendez-vous dans de discrètes échoppes. Enfin, le mieux de mon point de vue, c’est de se balader aux alentours de 22h. Les soirées se terminent, les portes s’ouvrent et c’est le moment de plonger secrètement dans l’univers des geisha.
Récit de voyage : ma rencontre avec les geisha
Kyoto jour 9, avril 2018
Je rêve de voir des geishas mais cela n’est pas aisé paraît-il, elles se font très discrètes. Une centaine officierait encore à Kyoto, ce qui semble peu. Vers 17h, je parcours les ruelles de Gion, le quartier traditionnel de Kyoto où les geisha vivent et travaillent. Je longe les murs pour tenter d’en voir apparaître une au détour d’une impasse, apprêtée pour son rendez-vous mais je finis par rentrer bredouille et un peu déçue.
Un peu plus tard à l’heure du dîner, je retrouve mon amie Sumire. Voilà deux ans que nous ne nous étions pas revues ! En 2016 nous nous étions rencontrées alors que nous travaillions ensemble dans les vignes à Blenheim en Nouvelle-Zélande. Elle m’emmène dans un restaurant pour goûter les fameux légumes de Kyoto.
Nous testons le bambou et dégustons une tête de poisson grillée succulente, du boeuf, délicieux aussi et du saumon grillé que j’aime moins. Le goût est très fort. Les geisha que j’ai aperçu dans la journée n’en étaient pas me soutient mon amie. Elle en est sûre à 100% : la journée les geisha pratiquent et ne sortent que tôt le matin ou en début de soirée pour rejoindre leur lieu de rendez-vous. Les jeunes femmes que j’ai croisé aujourd’hui devaient être des touristes japonaises s’essayant à devenir geisha le temps d’une heure. Après l’échec de la fin d’après-midi c’est une nouvelle déception pour moi. Sont-elles donc si difficiles à apercevoir ?
Nous décidons finalement de partir ensemble à leur recherche. Sans grand espoir, je profite surtout de la pleine lune et de la beauté de Sarakawa Dori de nuit avec ses restaurants illuminés. Le rendu est extra.
Quand soudain, dans une rue moins animée, seulement illuminée de quelques enseignes neon, devant nous au loin, sortent d’une échoppe une geisha et son riche protecteur du soir. Ils marchent gracieusement ensemble. Il semble que je viens d’entrer dans un film ou de remonter le temps. Je les revois encore échanger des regards mi-timides mi-complices, moi observant la scène de derrière.
Je ressens à cet instant énormément d’excitation, de respect et de curiosité. Je suis comme une enfant. À leur disparition, je continue ma promenade nocturne devenue quête avec plus d’entrain encore, en me faufilant au coeur des ruelles de bois du Gion à nouveau. Là encore la chance me sourit ! À plusieurs reprises j’observe des soirées qui s’achèvent. Des portes s’ouvrent sur les invités qui repartent joyeusement et dans de grands éclats de voix. Une jolie geisha s’échappe furtivement dans la nuit pour rentrer.
Une autre fois, des hommes rient en quittant un établissement et en entrant dans un taxi noir. J’aperçois par la porte ouverte une maiko, apprentie geisha et sa geiko, professeure accomplie, à l’intérieur de l’antre. Derrière le panneau coulissant, la maitresse des lieux surveille attentivement les quelques curieux plantés là comme moi, pour les garder à distance. Un dernier éclat de rire illumine le visage de la plus jeune, un signe de la main et un salut respectueux. Elles me remarquent et rient entre elles. Très vite la porte se referme et le spectacle est terminé. Pourtant le temps d’un instant, mon coeur a investit les lieux, je me suis laissée porter par les émotions de cette vision comme rêvée.
Mon cœur bat la chamade. Je les ai vues. Le mystère qui les entoure en fait des mythes et l’instant pour moi se déguste avec magie et émotions. Sur le chemin du retour j’en croise une ou deux, filant à petit pas rapides et serrés se cachant dans la nuit, telles des ombres, des silhouettes à contre jour. Ce sont des muses.
Autre expérience magique à tester au Japon : se baigner dans les onsen à découvrir dans cet article.
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